Quoi que l’on puisse penser du tout nouveau contrat de génération, celui-ci nourrit des ambitions tout à fait louables : face à une jeune génération qui connaît un taux de chômage particulièrement élevé et des séniors dont le taux d’activité est nettement en-deçà des niveaux attendus, il a le mérite de remettre au centre du débat le sujet de l’intergénérationnel, qui n’a jamais vraiment fait partie des priorités des Directions RH.
Tout l’enjeu va, une fois de plus, consister à prendre appui sur ce qui peut être perçu comme une contrainte, un énième plan à mettre en place, pour en faire un outil dont l’entreprise pourra tirer le meilleur profit…. par exemple, ce pourrait être pour l’entreprise de s’organiser afin qu’une transmission des savoirs intergénérationnels ait lieu via le tutorat.
Dans ce registre, le groupe Technip, rompu à la gestion de grands projets mixant générations et nationalités des intervenants, a fait preuve de volontarisme en la matière en créant l’Ecole du Savoir. C’est avant tout une méthode de transfert des connaissances qui prend la forme d’entretiens entre trois intervenants : le transmetteur, qui est détenteur d’une compétence identifiée comme critique, le receveur de ce savoir (ce peut être une personne ou un groupe), qui est chargé d’intégrer ce transfert afin de l’appliquer au quotidien puis le traducteur, sorte de catalyseur de la connaissance transmise, chargé de la synthétiser et de l’orienter. Sur une période d’environ 3 mois, traducteur et transmetteur travaillent ensemble à recueillir et formaliser les compétences critiques ; une fois cette étape franchie, le traducteur restitue ce savoir aux receveurs qui eux-mêmes le diffuseront dans le service.
Conditions nécessaires et pas forcément suffisantes pour que cela puisse fonctionner : que la Direction soit mobilisée, qu’une gestion en mode projet soit adoptée (avec des moyens alloués et des objectifs concrets et lisibles), bref, que cette ambition se matérialise pas une démarche, des actions concrètes et une animation sur le terrain.
Dans les faits, il reste visiblement du chemin à parcourir : d’après une étude de juin 2012 réalisée par Notre Temps et Entreprise & Carrières, parmi plus de 2 000 salariés de plus de 50 ans interrogés, seul 1 sur 8 considérait que le tutorat avait été mis en place dans son entreprise. Ce ressenti est d’autant plus faible que les accords sur les séniors ont largement sensibilisé les entreprises à faire endosser ce rôle de tuteur aux générations les plus expérimentées.
Le contrat de génération offre aujourd’hui aux entreprises une seconde chance de faire vivre en leur sein la collaboration entre générations et d’accéder à un formidable tremplin de partage des savoirs et des savoir-faire… mais c’est à nouveau à elles d’en décider.